Stratégie de marque : réussir un rebranding

La marque est un actif immatériel durable d’une organisation qui doit s’adapter aux évolutions des marchés et de la gouvernance institutionnelle.
Pour rester pertinente, se réinventer ou élargir son influence, une marque doit parfois évoluer et changer de façon radicale. Ce changement de marque (rebranding) est toujours un un projet stratégique qui doit mobiliser un investissement humain et financier important et qui nécessite une préparation et un pilotage minutieux.

Qu’est que que le rebranding ?

Le rebranding, ou changement de marque, consiste pour une entreprise à faire évoluer tout ou partie d’une de ses marques établies. Le rebranding peut porter sur un changement du nom de marque ou de l’identité  visuelle (logotype, charte graphique et système d’identité visuelle).

Ces changements des signes physiques de la marque se doublent de l’évolution des messages qu’elle porte : raison d’être, valeurs, identité, promesse, missions, etc.

Quels objectifs pour un rebranding ?

La mise en place d’un changement de marque est un processus souvent complexe, qui nécessite un investissement marketing important, interne autant qu’externe.
Pour réussir un rebranding, la première condition est donc de répondre à un objectif stratégique de la marque ou de l’organisation.

Le rebranding peut d’abord répondre à une vision proactive du marché. Il alors sert à anticiper ou accompagner des changements majeurs : 

  • Pour répondre aux évolutions d’attitude ou de références culturelles des nouvelles générations des publics de la marque.
  • Pour rester en phase avec l’évolution des technologies
Le rebranding vise souvent à rester en phase avec l'évolution des marchés et des audiences.

Le rebranding peut aussi accompagner l’évolution stratégique d’une entreprise ou d’une organisation : 

  • Pour traduire le résultat d’une évolution institutionnelle d’une entreprise : fusion ou acquisition par exemple, afin de définir une nouvelle identité de marque qui représente les entités combinées et leurs valeurs.
  • Pour refléter un changement de direction stratégique ou une nouvelle vision, notamment dans le cadre d’un changement de gouvernance 
    • Dans le secteur de la tech, l’évolution des marques-mères Google et Facebook vers Alphabet et Meta visent la clarification de la structure institutionnelle des deux entreprises avec la création d’une marque-ombrelle corporate distincte des marques-produits originelles.
  • Pour toucher un nouveau public, dans le cadre d’un développement à l’international ou du déploiement sur des marchés nouveaux.
    • En 2013, par exemple, la start-up Covoiturage.fr devient BlaBlaCar pour accompagner son expansion à l’étranger et unifier sa communication autour d’un seul nom de marque.
    • En 2015, GDF-Suez change de nom pour devenir Engie. Objectifs : se démarquer de l’image de fournisseur de gaz pour se développer sur les marchés de l’énergie renouvelable et adopter une marque à consonance anglo-saxonne pour améliorer la perception à l’international.
  • Pour accompagner une diversification de l’offre de produits ou de services

Le rebranding peut aussi être une stratégie réactive, qui permet à une marque de se débarrasser d’une image dégradée ou répondre à une problématique juridique. En 2005, le Crédit Lyonnais, plus ancienne marque de l’univers bancaire en France, change d’identité pour devenir « LCL« . Ce changement de nom avait essentiellement pour objectif de détacher la marque du scandale financier de l’Affaire Tapie. A cette époque, la marque « Crédit Lyonnais » était systématiquement associée à l’un des plus gros scandales financiers français. Le rebranding peut même parfois être contraint, notamment pour des raisons liées à la propriété intellectuelle des marques. En 2024, l’enseigne Tesco a été contrainte par la justice anglaise de réviser l’identité de sa carte de fidélité ClubCard, jugée trop proche du logo de Lidl.

Le rebranding peut aussi servir ces deux objectifs simultanément. Dans le secteur de santé, la marque Orpéa, leader mondial des EHPAD, dont l’image a beaucoup souffert en 2022, suite à la publication du livre « Les fossoyeurs », a décidé de changer de nom en 2024, pour devenir Emeis. Ce rebranding a d’abord servi à détacher la marque de ce scandale très médiatisé, mais aussi à accompagner la refonte de sa raison d’être ( » Ensemble, soyons force de vie des plus fragiles » ) et la restructuration du groupe, un choix considéré comme « une étape indispensable de la transformation du groupe…afin de recréer de la fierté et un sentiment d’appartenance »1.

Dans tous les cas, la définition d’un  objectif stratégique, clair et mesurable est une condition nécessaire pour réussir un rebranding.

Comment mener un projet de rebranding ?

Définir un objectif

Avant d’entamer tout projet de rebranding, il est nécessaire de décrire et fixer les objectifs stratégiques, spécifiques, mesurables et réalistes du changement de marque.
Il est aussi très important de fixer des échéances claires : les projets de rebranding ont tendance à se déliter au fil du temps et rencontrent souvent une résistance importante au changement.

Évaluer la situation de la marque existante

Un changement de marque nécessite une évaluation précise et objective de la situation de la marque existante.
Il est particulièrement important de mesurer la notoriété de la marque existante. Plus cette notoriété est importante, plus l’investissement à consentir dans le changement de marque est élevé.
L’évaluation de la marque existante doit aussi porter sur les autres caractéristiques de qui la positionnent dans l’esprit des publics : rappel, reconnaissance, préférences, fidélité, associations d’image, attributs, promesse, valeurs, personnalité, etc.

Mettre en place un comité de marque

Toute marque est un actif stratégique pour une organisation. Piloter la refonte d’une marque nécessite l’implication et le concours de toutes les parties prenantes de l’organisation. La constitution d’un comité de marque, garant des objectifs et du timing du projet est un atout essentiel du projet. Constitué de 3 à 7 personnes, il permet de mobiliser les parties prenantes de l’organisation, notamment la direction générale, le commercial, le marketing, la communication et le juridique.

Le comité de marque est un outil de gouvernance marketing indispensable à la réussite d'un rebranding.

Mobiliser l’œil extérieur et l’expertise de spécialistes du branding et de l’image de marque

Les projets de rebranding internes fonctionnent rarement. Trop limités par le respect des hiérarchies internes, ils manquent aussi souvent d’expérience dans le changement de marque et d’une perspective externe.
Le recours à une agence conseil est un atout précieux, qui apporte des idées neuves et une vision objective des enjeux du rebranding, débarrassée des considérations internes.

Le benchmark : pour aider au positionnement

Toutes les marques évoluent dans un environnement concurrentiel. Elles se positionnent par rapport à d’autres marques sur des attributs précis. 

Avant de se projeter sur une nouvelle marque, le comité de marque doit se nourrir de l’évolution de ce paysage concurrentiel.

Le benchmark des stratégies de communication concurrentes est ainsi un préalable indispensable à toute réflexion stratégique sur l’évolution de la marque.

  • Quelles sont les marques avec lesquelles nous sommes en concurrence ?
  • Quels sont leurs messages ?
  • Comment s’expriment-elles ?
  • A quelles audiences s’adressent-elles ?
  • En quoi nous sont -elles supérieures ?
  • Sur quels terrains sommes-nous plus performants, plus convaincants ?

Définir le message

Quel que soit le projet marketing, il est toujours essentiel de définir précisément le message qu’une marque souhaite véhiculer.

Le rebranding vise à donner un autre visage, une autre voix, d’autres symboles à notre marque. Pour réussir un projet de rebranding, il est essentiel de définir l’évolution souhaitée de la marque : 

  • Pourquoi la marque a-t-elle évolué ? 
  • En quoi est-elle différente ?
  • Qu’apporte-t-elle de nouveau à nos publics ?

Définir un plan et un budget de communication

Tout changement de marque nécessite un investissement important. Les marques installées ont une inertie importante : il est difficile de faire comprendre (et accepter !) le changement d’une marque.
Le plan de communication doit avoir pour objectif de porter le message du changement de marque auprès des audiences visées avec une puissance et une fréquence qui assurent le maintien des performances de la marque existante.
Le budget de communication nécessaire à l’installation durable d’une marque renouvelée est souvent sous-estimé : c’est un écueil majeur à la réussite du rebranding.

Obtenir l’adhésion des publics internes

Dans le plan de communication attaché au changement de marque, le public interne doit être considéré comme prioritaire. Les échecs de rebranding ont majoritairement leur source dans le manque d’adhésion des publics internes. Ce public doit être informé puis convaincu dès le départ du projet, avec l’objectif de transformer les publics internes en véritables ambassadeurs de la nouvelle marque, capables de l’endosser mais aussi d’en faire la promotion.

Viser un changement rapide et exhaustif de la marque

Le risque de confusion est très grand dans les projets de rebranding. Il peut se traduire par une perte de visibilité et d’efficacité de la marque, qui peut se traduire brutalement par une baisse de ventes, une attractivité dégradée, etc.

Pour mettre en place un changement rapide de la marque, il est indispensable : 

  • De recenser tous les supports porteurs de la marque
  • De planifier leur changement sur la période la plus courte possible

Le rebranding par l’exemple

2016 : CVS devient CVS Health

Début 2016, CVS, une marque américaine connue pour son immense chaîne de pharmacies à l’échelle nationale, est devenue CVS Health. Ce rebranding s’est accompagné d’une restructuration du portefeuille de marques avec la création de quatre marques-filles : CVS Pharmacy, CVS Specialty, CVS Minute Clinic et CVS Caremark, chacune offrant à son marché des produits et des services dans un domaine spécifique du bien-être.

La conservation et la mise en évidence de « CVS » dans les noms de ces nouvelles sous-marques a clarifié l’architecture, permettant à CVS Health d’élargir la portée de ses offres tout en tirant parti du capital de confiance de sa marque principale historique.

Les sous-marques de la famille CVS ont également utilisé la typographie et les couleurs bien connues des pharmacies CVS d’origine : une marque n’a pas toujours besoin d’une refonte complète de son identité pour qu’un rebranding soit couronné de succès !

Siemens Heathcare rate son rebranding avec Healthineer

Le changement de marque de Siemens Healthcare en 2016 est l’un des exemples les plus célèbres de rebranding raté dans le secteur de la santé. La marque choisit en effet de remplacer le classique « Healthcare » par un néologisme « Healthineers » censé évoquer l’alliance de santé (« Health ») avec les notions de pionnier (« Pionneer ») ou d’ingénieur (« Engineer ») ou de volontaire (« Volunteer »).
Malheureusement, le nom composé rate sa cible et ne réussit pas à traduire ces notions : le lancement de la nouvelle marque a été l’objet de nombreuses critiques en ligne… Clarté, simplicité et lisibilité sont essentielles dans tout projet de rebranding.

Backspin a conçu et piloté plusieurs projets de rebranding réussis dans les secteurs de la santé, du retail, des technologies et de l’action publique.

Vous avez un projet de changement de marque ? Contactez-nous pour un premier échange !

Dominique Maeker

Dominique Maeker

Associé
Spécialiste Stratégie Marketing et Communication
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Crédit photo : Jason Goodman, Unsplash


  1. Interview de Frédérique Raoult, Directrice de la Communication d’Orpéa, Stratégies 2270 du 7 mars 2024 ↩︎